Qu’est ce qu’une chimère ?
Dans la mythologie, une chimère est une créature fantastique dont le corps est composé de plusieurs animaux. Un des exemples les plus connus est la chimère d’Arezzo qui est un mélange de lion, chèvre et serpent.
Chimère d'Arezzo |
En biologie, la chimère est un organisme contenant des génotypes provenant d’individus différents. De nos jours, les scientifiques sont capables de produire des chimères et cela est même devenu une expérience de routine afin de tester les cellules souches embryonnaires qu’ils ont produites, de créer des animaux transgéniques ou encore de tester l’action de tel ou tel gène dans le développement embryonnaire. Cependant les chercheurs n’étaient pas encore parvenus à créer des chimères de primates. Cet obstacle a été levé au début du mois de janvier et les résultats ont été publiés dans la revue Cell.
Chimero, Hex et Roku sont trois petits singes rhésus nés du mélange de plusieurs embryons au stade 4 cellules (Hex a été obtenu par mélange de 6 embryons !). Les embryons ne fusionnent pas mais co-opérent afin de créer un organisme entier.
Protocole expérimental pour la création des chimères de singe |
Cette découverte est une grande avancée pour la compréhension du comportement des cellules souches embryonnaires de primates in vivo. Selon le Dr. Mitalipov, responsable de la création de ces chimères de singe, « Si nous voulons utiliser la thérapie par cellules souches embryonnaires, nous devons comprendre ce que peuvent ou ne peuvent pas faire les cellules souches embryonnaires de primates ».
Cet article est aussi l’occasion pour moi de revenir sur un point de bio-éthique qui a secoué le monde de la recherche en 2007. Lyle Armstrong, chercheur à l’université de Newcastle, a obtenu, cette année là, l’autorisation de retirer le noyau d’un ovule de vache afin de le remplacer par le noyau d’une cellule humaine. L’œuf fécondé ainsi obtenu s’est développé 3 jours, jusqu’au stade 32 cellules. Cette recherche devait permettre de ne plus avoir recours aux embryons humains pour dériver des cellules souches embryonnaires dans des visées thérapeutiques. L’idée de base était intéressante mais a engendré un débat public important. Un cardinal écossais, Mgr O’Brien a évoqué « une attaque monstrueuse contre les droits de l’homme ». Il fut rejoint dans l’idée par Callum MacKellar du conseil de bioéthique écossais : « Si l’autorisation est donné, cela va sapper les droits de l’Homme ainsi que sa dignité ». D’autres étaient pour, comme le Dr Evan Harris qui disait que ce serait « immoral d’empêcher cette recherche si elle permettait une avancée importante dans la thérapie par cellules souches embryonnaires ». L’autorisation fut donnée en 2007 et les résultats sont pour le moment peu convaincants. Pensez-vous que la recherche va trop loin ?
Pour en savoir plus :
- L’article dans Cell sur les premières chimères de singe : http://www.cell.com/abstract/S0092-8674%2811%2901508-X
- L’article sur les chimères obtenues avec des cellules souches embryonnaires sur mon blog : http://dessousdescience.blogspot.com/search/label/cellules%20souches%20embryonnaires
- L’article BBC sur les « chimères homme-vache » : http://news.bbc.co.uk/2/hi/6121280.stm